En juillet 2022, la Ville de Paris a adhéré à l’association France Énergie Animale, s’inscrivant dans un processus qui consiste à utiliser la force de travail d’équidés pour remplacer des machines. Cette démarche, anachronique et contraire à l’éthique, est pourtant défendue au nom de la préservation de l’environnement. Nous allons voir que, même d’un point de vue écologique, il s’agit d’une mauvaise idée.
Depuis 1998, dans le bois de Vincennes, la Ville de Paris utilise des chevaux de trait pour le débardage, c’est-à-dire le transport d’arbres coupés jusqu’à leur lieu de dépôt ou éventuellement de broyage sur site. Cette démarche, qui semble anachronique en termes à la fois technologiques et de condition animale, est défendue par ses partisans sur la base d’arguments environnementaux : l’utilisation d’équidés de travail permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). À l’appui de ce point de vue, un rapport publié en 2016, intitulé Étude comparative de plusieurs modes d’utilisation de la traction animale avec leur équivalent thermique et électrique(1), est souvent mis en avant. Le présent article est une analyse critique de ce rapport et de son applicabilité au débardage à Paris.
Nous allons voir que le manque d’impartialité du rapport le conduit à formuler des hypothèses trop favorables à la traction animale, ce qui aboutit à des résultats erronés. En réalité, les gains en termes d’émissions de GES sont au mieux faibles et obtenus au prix d’un coût économique important, qui pourrait être alloué à de meilleurs projets de réduction des émissions de GES.
Un rapport à l’impartialité douteuse
L’étude comparative de plusieurs modes d’utilisation de la traction animale avec leur équivalent thermique et électrique, commandée par le Département de la Charente Maritime, a été menée par le cabinet d’ingénierie Artelia, « en partenariat » avec l’Institut français du Cheval et de l’Équitation (IFCE), et financée notamment par le Fonds Éperon. Il est indiqué que l’ADEME a soutenu cette étude sans plus de précisions. L’IFCE est, de ses propres dires « l’opérateur public au service de la filière équine »(2) ; il a fourni une grande part des données bibliographiques. Le Fonds Éperon, quant à lui, « participe au financement de projets au bénéfice de l’ensemble de la filière cheval, hors activité des courses »(3).
Autrement dit, la filière équine a fourni à la fois des données et des fonds nécessaires à cette étude. Dans ces conditions, l’étude ne peut être que partiale. De fait, le rapport est construit sur des hypothèses déconnectées de la réalité, beaucoup trop favorables à l’usage du cheval.
Des hypothèses irréalistes qui mènent à des résultats fallacieux
En page 40 du rapport, on trouve un diagramme comparant les émissions de GES par traction animale et par engin thermique sur un chantier type de débardage. Le diagramme indique une performance spectaculairement meilleure pour la traction animale. Ça semble presque trop beau pour être vrai. D’ailleurs, c’est faux.
Figure 1. On trouve ce diagramme en page 40 du rapport. Construit sur des hypothèses irréalistes, il présente un résultat faux.
Tout d’abord, un cheval de trait peut vivre entre vingt-cinq et trente ans, voire plus(4,5). Sa vie se compose de trois périodes. La première (0-4 ans selon le rapport) est celle de sa jeunesse, avant qu’il commence à être utilisé. La deuxième est celle où il est exploité (4-13 ans selon le rapport). La troisième, lorsqu’elle existe, est celle de la “retraite” : le cheval termine sa vie sans exploitation. Or, le graphique de la page 40 présente une valeur d’émissions de GES par chantier calculée sur la base des émissions correspondant à la seule période de travail. Dans l’étude, cette méthode de calcul est appelée le Cas 1 et aboutit à une valeur de 2,3 kg eqCO2 par heure d’utilisation. (Calcul 1)1
Table 1. Tableau en page 21 du rapport, indiquant leurs estimations du coût GES horaire de la traction animale pour différentes hypothèses de calculs plus ou moins réalistes (“Cas”)2.
Mais c’est absurde : les chevaux ne naissent pas à l’âge de quatre ans en état d’être exploités ! De même, les chevaux de la Ville de Paris n’ayant pas vocation à être abattus, ils ne se volatilisent pas à l’issue de leur période de travail. Les calculs d’émission de GES doivent donc prendre en compte les trois phases de la vie et pas seulement la période de travail, sans quoi les émissions de GES horaires seraient grandement sous-estimées3. Eux-mêmes conscients de ce problème, les auteurs ont donc envisagé un Cas 2, censé prendre en compte les émissions de GES correspondant aux trois phases de la vie du cheval.
Dans ce Cas 2, la quantité calculée des émissions de GES se trouve logiquement augmentée par rapport au Cas 1, à 3,9 kg eqCO2 par heure de travail. Examinons néanmoins sur quelles hypothèses repose ce nouveau calcul. La jeunesse du cheval correspond à la période 0-4 ans, ce qui est raisonnable. La période de travail va de 4 à 13 ans. Cela peut sembler court mais une durée moyenne de neuf années de travail est une hypothèse valide. En effet, si certains chevaux peuvent avoir une carrière plus longue, d’autres doivent être mis à la retraite prématurément, éventuellement très jeunes, du fait par exemple d’une blessure ou de problèmes de comportement (c’est ce qui est arrivé il y a quelques années à Biba, une jument de la Ville de Paris qui a perdu son sang-froid lors d’une sortie et qui a dû être immédiatement réformée(8)). Enfin, l’hypothèse qui a été faite sur la durée moyenne de retraite n’est pas précisée, mais on peut la reconstituer en se fondant sur les valeurs d’émissions de GES utilisées : 2444 kg eqCO2 par an pour la période 0-4 ans, 2797 kg eqCO2 par an pour la période 4-13 ans et 2446 kg eqCO2 par an pendant la retraite. Après calcul, on trouve que la durée moyenne anticipée de la retraite est de… trois ans ! (Calcul 2)1 Cette hypothèse est déraisonnable : un cheval vit en général vingt-cinq, trente ans, voire plus. Pas seize !
De plus, le rapport suppose que les chevaux sont utilisés 1200 heures par an. Sans être nécessairement irréaliste, ce chiffre ne correspond pas au cas précis des chevaux de la Ville de Paris. En effet, ceux-ci sont utilisés quatre heures par jour, cinq jours par semaine. De plus, ils ont deux semaines de “congés” par an, ce qui fait en tout 1000 heures d’utilisation par an. Il faut noter que cette dernière valeur est encore surestimée car elle ne tient pas compte des jours où les chevaux ne sont pas utilisés du fait de blessures, d’intempéries ou encore d’absence de personnel humain suffisant.
Si on recalcule les émissions de GES par heure de travail en partant des hypothèses plus adaptées que sont une durée de vie de 27,5 ans et une utilisation des chevaux de 1000 heures par an, le résultat est bien différent : on ne trouve plus 3,9 mais 7,8 kg eqCO2 par heure de travail. Les émissions GES pour un chantier ne sont alors plus de 84 kg eqCO2 mais de 282 kg eqCO2 (Calcul 3)1 et 4. C’est très différent !
Une autre hypothèse qui pose problème a trait au coût GES « fabrication/fin de vie » des tracteurs. La fabrication d’un tracteur, son entretien et enfin son élimination sont à l’origine d’émissions de GES qui doivent être répercutées dans le calcul du coût GES horaire du tracteur, c’est parfaitement logique. Ce qui l’est moins, c’est de considérer qu’un tracteur est utilisé 300 heures par an et un cheval 1200 heures par an ! Sous-estimer le nombre d’heures d’utilisation du tracteur conduit mécaniquement à gonfler son coût GES horaire. Si on retient l’hypothèse plus réaliste selon laquelle un tracteur fonctionne 800 heures par an pendant 10 ans(9,10,11), son coût GES n’est plus de 51,3 mais de 47,3 kg eqCO2 par heure. Cela fait passer le coût GES du chantier pour l’engin thermique de 359 à 331 kg eqCO2. (Calcul 4)1
De plus, les émissions de GES associées à la fabrication et à la fin de vie du tracteur étant regroupées en une seule rubrique, on ne sait pas dans le détail quels chiffres ont été utilisés. Or c’est un point important concernant la fin de vie des engins : le recyclage des matériaux s’accompagne certes d’émissions de GES mais il permet d’éviter, lors de la production de l’engin suivant, une partie de la production primaire (métaux, par exemple). Cela entraîne une diminution des émissions de GES lors de la fabrication du tracteur suivant. Si cet effet est pris en compte, la fin de vie des engins peut être considérée comme émettrice nulle(6), voire négative, de GES(12).
Il est par ailleurs important de noter qu’une ville ne peut généralement pas se contenter de la traction animale pour ses travaux agricoles (de débardages notamment). Elle a donc nécessairement un tracteur par ailleurs. La traction animale assure donc des travaux qui pourraient l’être par ce tracteur (nous pouvons facilement imaginer qu’il n’est pas utilisé tout le temps). Donc, le fait de passer à la traction animale conduit mécaniquement à une augmentation du coût GES horaire de l’engin thermique de la ville en faisant baisser son temps d’utilisation.
Le diagramme qu’on obtient en corrigeant la sous-estimation du coût GES du cheval et la surestimation du coût GES du tracteur est bien différent de celui présenté dans le rapport.
Figure 2. En haut : détail des corrections effectuées par rapport au modèle de l’étude. En bas : conséquences des corrections sur le bilan GES du chantier.
La question du coût économique
Le rapport que nous analysons compare les émissions de GES entre la traction animale et les méthodes thermiques et électriques. En revanche, il n’étudie pas les coûts économiques associés. Cela peut sembler naturel s’agissant d’une étude à caractère environnemental. C’est pourtant une sérieuse lacune, et voici pourquoi. Supposons deux actions en faveur de l’environnement, A et B. L’action A permet d’éviter l’émission d’une tonne de CO2 pour un coût de 100 euros tandis que l’action B permet elle aussi d’éviter l’émission d’une tonne de CO2 mais pour seulement 50 euros. Il est évident que, même d’un point de vue strictement environnemental, il faut préférer l’action B : à budget égal, B permet de limiter les émissions de CO2 deux fois plus efficacement que A. Autrement dit, ce n’est pas parce qu’une action permet de réduire les émissions de GES qu’elle est nécessairement écologique. Si elle ne permet d’économiser qu’une faible quantité d’émissions pour un coût disproportionné, elle doit être considérée comme anti-écologique car l’argent investi aurait pu l’être dans de meilleurs projets en faveur de l’environnement. Nous allons voir que c’est précisément le cas du débardage par traction animale.
En effet, alors que le chantier type envisagé dans l’étude se fait en un jour avec un engin thermique, trois jours sont nécessaires avec deux chevaux. Il en résulte un surcoût économique considérable. D’après Paul et al.(13), le coût horaire moyen d’un tracteur pour des travaux de débardage est de 32 euros, contre 24 euros pour un cheval. À ce dernier chiffre, il convient de rajouter environ 4 euros par heure pour tenir compte du financement de la retraite du cheval(14 et calcul en annexe). On arrive ainsi à un coût par chantier de 224 euros pour l’engin thermique et de 571 euros pour la traction animale. (Calcul 5)1
Note de PAZ : aussi incroyable que ça puisse paraître, la Ville de Paris, qui s’enorgueillit de ne pas envoyer ses chevaux à l’abattoir, refuse de financer leur retraite. En pratique, elle s’en débarrasse purement et simplement en les envoyant à la Fondation Brigitte Bardot. Que ce soit la Ville de Paris ou la Fondation Brigitte Bardot qui finance la retraite des chevaux, celle-ci a un coût bien réel, qui doit être pris en compte dans le calcul du coût économique de la traction animale.
À ce stade, la situation pour le chantier de débardage type est résumée par le schéma suivant. Par rapport à un engin thermique, la traction animale permettrait de diminuer les émissions de GES de 49 kg eqCO2 (c’est-à-dire 0,049 tonne de carbone) pour un surcoût de 347 euros.
Figure 3. Comparaison des performances de la traction animale et de l’engin thermique en termes d’émissions GES et de coût économique.
La question qu’il faut maintenant se poser est celle-ci : est-il efficient d’investir 347 euros pour éviter l’émission de 0,049 tonne de carbone ?
Pour répondre à cette question, on peut se tourner du côté du marché de la compensation carbone volontaire. Son principe est le suivant. Pour compenser l’effet de ses émissions de CO2, un particulier, une entreprise ou une collectivité peut financer, sur la base du volontariat, un projet de séquestration ou réduction d’émissions de CO2.
Il ne s’agit pas d’engager un débat sur l’intérêt de la compensation carbone ou sur ses éventuels effets pervers. Ce qui nous intéresse ici, c’est le coût de la compensation carbone. On peut prendre la référence du Label bas-carbone(15,16). Celui-ci, créé par le ministère de la Transition Écologique, permet de certifier des projets de reboisement, plantation de vergers, rénovation de bâtiments, etc. Ces projets, conduits en France, ont pour finalité commune la séquestration ou la réduction d’émissions de CO2. Le coût moyen d’un projet labellisé bas-carbone est d’environ 40 euros pour une tonne de CO2(16). C’est sensiblement plus que la moyenne des projets internationaux mais la différence s’explique par les garanties fournies par le label. Ce qu’on peut en retenir en tout cas, c’est qu’avec 40 euros, on peut financer un projet certifié de séquestration ou de réduction d’émissions d’une tonne de CO2.
Finalement, est-il efficient d’investir 347 euros pour éviter l’émission de 0,049 tonne de CO2 ? La réponse tient en deux mots : absolument pas. En investissant judicieusement 347 euros, c’est l’émission non pas de 0,049 mais de 8,7 tonnes de CO2 qu’on peut éviter, soit 177 fois plus (Calcul 6)1. Autrement dit, si la Ville de Paris choisissait de se passer de la traction animale et consacrait la somme économisée à des projets plus pertinents, la réduction d’émissions de CO2 réalisée s’en trouverait multipliée par 177 ! Le choix de la traction animale comme politique de réduction des émissions de GES est donc d’une rare inefficience.
Figure 4. L’utilisation de l’engin thermique est prise comme référence. Le passage à la traction animale permet d’éviter l’émission de 49 kg eqCO2 par chantier pour un surcoût de 347 euros. La condition « projet labellisé bas-carbone » consiste à continuer d’utiliser l’engin thermique mais en affectant le budget de 347 euros à un projet de réduction des émissions de GES labellisé bas-carbone. Au total, le budget est le même mais la quantité d’émissions évitées est considérablement plus importante.
Les tracteurs électriques et le biocarburant, angles morts de l’étude
Comme nous avons déjà démontré la totale inefficience de l’utilisation de la traction animale en alternative d’un engin thermique pour réduire les émissions de GES, nous ne détaillerons pas ici le potentiel intérêt de l’électrique.
Mais il est important de noter que l’étude sur le débardage compare les GES émis par des chevaux à ceux émis par un tracteur thermique de 150 CV et n’effectue pas de comparaison avec un engin électrique, au motif de l’« absence d’alternative » électrique. C’était peut-être vrai en 2016 mais ça ne l’est plus en 2022. Depuis plusieurs années, il existe des tracteurs électriques d’une puissance supérieure à 150 CV, comme le modèle Sesam de la marque John Deere(17). Pour les autres usages de la traction animale où l’étude a trouvé une alternative électrique (entretien des dunes et des plages par portage, transport public, scolaire ou touristique, et balayage des voies), elle conclut à un coût GES de l’électrique plus faible que celui la traction animale et/ou de l’engin thermique.
Une autre option potentiellement intéressante n’a pas été prise en compte dans le rapport : l’emploi de biocarburant. Comme le carburant est responsable de la majeure partie des émissions de GES par les engins thermiques (80% selon le rapport), l’utilisation de biocarburant incorporé au carburant mériterait en effet d’être envisagée. S’ils ne proviennent pas de cultures ayant remplacé des forêts, les biocarburants incorporés pourraient constituer une source importante de réduction des émissions de GES par les engins thermiques. D’après la Direction générale de l’Énergie et du Climat, ils émettraient en moyenne 63% de GES de moins que le carburant fossile(18).
Au-delà des gaz à effet de serre, les autres impacts environnementaux de la traction animale
Le rapport ne porte que sur les émissions de GES mais l’utilisation du cheval est responsable de nombreuses autres atteintes à l’environnement :
Par leurs excrétions, les chevaux sont à l’origine d’une importante pollution azotée, ce qui n’a rien de surprenant quand on sait qu’un cheval émet en moyenne environ 10 L d’urine et 4 kg de matière sèche de fèces par jour(19).
Aux dégâts chimiques provoqués par les excrétions s’ajoutent des dégâts physiques tels que le piétinement, la destruction des végétaux et l’érosion du sol. Il peut en résulter une altération de l’écosystème des surfaces pâturées(19).
La production de foin pour nourrir les chevaux accapare d’importantes surfaces de terre, ce qui conduit à la destruction de l’habitat de certains animaux sauvages. De plus, au moment de la récolte, de nombreux animaux (lièvres, chevreuils, faisans…) meurent fauchés par les machines agricoles. On estime par exemple que lors de la fauche d’une parcelle de luzerne, environ 15 % des lièvres présents sont tués. Or la luzerne doit être fauchée trois à cinq fois par an(20).
L’utilisation croissante de substances pharmaceutiques à usage vétérinaire est un problème car les substances administrées – à dose de cheval ! – sont ensuite éliminées par voie urinaire ou fécale et contribuent à polluer les eaux souterraines et de surface(21).
Les crottins de chevaux sont une source de contamination bactérienne de l’eau potable(19).
Enfin, le changement climatique favorise le développement d’une plante toxique pour les chevaux : la porcelle enracinée. Son ingestion provoque chez les équidés une affection des nerfs qui conduit à une hyperflexion involontaire plus ou moins exagérée d’un ou des deux membre(s) postérieur(s)(22). D’après l’IFCE, il y a eu une recrudescence des cas de cette maladie en 2003, où la canicule avait permis à la porcelle enraciné de se développer(23). Cette plante vient donc s’ajouter aux raisons évidentes de baisse de rendement pour l’alimentation des chevaux (et donc l’augmentation des émissions de GES et des impacts négatifs sur l’environnement) engendrées par les épisodes de sécheresse et de canicule.
Le seul impact positif sur l’environnement de la traction animale par rapport aux engins motorisés porte sur le fait que les chevaux ont tendance à moins dégrader le sol par compactage et érosion(19). Comme nous l’avons vu c’est un petit avantage face à une longue liste d’impacts négatifs et un grand gaspillage financier (qui pourrait servir à engager des actions réellement efficientes pour limiter nos émissions de GES).
En résumé, l’utilisation de chevaux de trait par la Ville de Paris n’est pas une tentative sérieuse de réduction des émissions de gaz à effet de serre. N’importe quel projet raisonnable permettrait d’obtenir un impact plus important avec un budget moindre.
Au-delà du cas particulier du débardage à Paris, plusieurs conclusions peuvent être généralisées :
La nécessaire prise en compte de la “retraite” des équidés alourdit considérablement le bilan carbone de la traction animale.
Les économies d’émission de gaz à effet de serre éventuellement réalisées grâce à la traction animale sont plutôt symboliques, pour un coût économique disproportionné.
Indépendamment des gaz à effet de serre, l’utilisation d’équidés pose des problèmes environnementaux spécifiques.
Enfin, les politiques de “bien-être animal” n’assurent pas aux animaux une vie épanouissante, ni une absence de souffrance (elles sont seulement censées assurer qu’ils ne souffrent pas au-delà de ce que leur utilisation nécessite). À l’heure où des machines peuvent accomplir un travail identique avec une meilleure efficacité, il n’y a absolument plus lieu d’utiliser des chevaux comme… des machines.
Notes de bas de page
2 Dans le Cas 3 l’étude envisage d’envoyer les chevaux à l’abattoir et calcule le bénéfice de la valorisation de la viande de cheval (en remplacement de la viande de bœuf). Dans la suite, ce Cas ne sera pas pris en compte et pour cause : le rapport écrit que la fin de vie des animaux doit être réfléchie “sous peine de conduire à des actions contre-productives telles que des réactions vives du public, susceptibles de compromettre la pérennité des actions engagées”. Pour résumer, si l’opinion publique n’était pas particulièrement hostile au fait d’envoyer les chevaux à l’abattoir, alors cela serait une option envisageable. D’ailleurs, le label de “bien-être animal” auquel la Mairie de Paris prétend, n’impose pas de ne pas envoyer les animaux à l’abattoir.
3 Il faut noter que les études qui concluent à une supériorité de la traction animale en termes d’émissions de GES supposent toujours que les chevaux sont envoyés à l’abattoir dès leur période d’exploitation terminée(6,7).
4 Dans cet article, les calculs sont effectués à partir des données moyennes fournies par le rapport. Ainsi, lorsque nous affirmons par exemple que les émissions recalculées de GES pour un chantier sont de 84 kg eqCO2, il faut comprendre 84 kg eqCO2 en moyenne, ou 84 kg eqCO2 environ. Mais comme on le verra, des valeurs moyennes sont largement suffisantes pour conclure sur la pertinence, ou plutôt l’absence de pertinence, de la traction animale.
Références
1. Département de la Charente Maritime. 2016. Étude comparative de plusieurs modes d’utilisation de la traction animale avec leur équivalent thermique et électrique.
2. Institut français du cheval et de l’équitation. https://www.ifce.fr/ (consulté le 15/08/2022).
3. Fonds Éperon. https://www.fondseperon.com/historique (consulté le 15/08/2022).
4. Wikipédia. Vieillesse du cheval. https://fr.wikipedia.org/wiki/Vieillesse_du_cheval (consulté le 15/08/2022).
5. Équidéos. L’heure de la retraite. https://www.equideos.com/blog/retraite-chevaux (consulté le 15/08/2022).
6. Engel, A.M., Wegener, J. & Lange, M. 2012. Greenhouse gas emissions of two mechanised wood harvesting methods in comparison with the use of draft horses for logging. Eur J Forest Res 131, 1139–1149. https://doi.org/10.1007/s10342-011-0585-2
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9. Machinery Machine. Tracteur à 3000 heures : quels points vérifier avant d’acheter ? https://www.machinery-machine.com/article-tracteur-a-3000-heures-quels-points-verifier-avant-dacheter/ (consulté le 15/08/2022).
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12. Groupe Renault. 2021. Analyse du cycle de vie comparative nouvelle Zoé et Clio V. https://www.autoactu.com/documents/telecharger/analyse-du-cycle-vie-comparative-renault-zoe-et-clio-v
13. Paul, M. & Lombaerde, F. & Jourez, Benoit. 2006. Approche économique du cheval en forêt. Forêt Wallonne. 81, 15-25.
14. Vétitude. Retraite et fin de vie des équidés : comment répondre aux besoins futurs ? https://www.vetitude.fr/retraite-fin-de-vie-des-equides-comment-repondre-aux-besoins-futurs/#Limpact_economique_des_chevaux_a_la_retraite (consulté le 14/08/2022).
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