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La condition animale au Conseil municipal de Lyon – mars 2024

Lors du Conseil municipal de Lyon du 21 mars 2024, une délibération sur la condition animale proposée par la majorité écologiste a été adoptée. Le texte prévoit des engagements pour la fin du mandat pour les animaux de compagnie, les animaux d’élevage, les animaux liminaires et les animaux emprisonnés au zoo de Lyon. Dans cet article, nous analyserons en détail les mesures liées à ces deux dernières catégories d’animaux (nous suivons avec attention l’action de la municipalité lyonnaise sur ces points). Malheureusement, les poissons victimes de la pêche de loisir sont totalement absents de cette délibération alors que la Mairie de Lyon a la compétence du parc de la Tête d’Or où la pêche de loisir est autorisée.

Quelques éléments de contextualisation

PAZ avait eu un entretien avec l’Adjoint à la condition animale, Gautier Chapuis, le 23 février 2024 pour échanger sur la question du zoo. L’Adjoint avait évoqué le vote de cette délibération le 21 mars 2024, mais malgré nos demandes réitérées, la Mairie de Lyon a refusé de nous transmettre son contenu précis avant le jour du Conseil municipal. Nous avons été très étonnés de cela : d’autres municipalités mettent en ligne le contenu de leurs délibérations (c’est par exemple le cas de Paris). De notre point de vue, ce manque de transparence entrave l’exercice de la démocratie. Alors que PAZ est experte du sujet des animaux liminaires, nous n’avons pas pu faire de retours sur les mesures proposées (à notre sens, il y a notamment un problème dans le vocabulaire utilisé malgré la bonne volonté qui transparaît de la Mairie sur la gestion des pigeons et des rats). De plus, en empêchant l’accès au contenu d’une délibération, la Mairie empêche les associations de l’analyser en détail (cela demande du temps) et de proposer des modifications. En effet, il est aussi courant que les oppositions proposent des amendements (propositions de modifications sur une délibération).

Des remarques d’ordre général

La Mairie met en avant un plan d’action de 60 mesures dans cette délibération. Ce chiffre important est à relativiser : 

  • 18 mesures sont liées à la biodiversité. Or, biodiversité n’est pas synonyme de condition animale : des actions en faveur du premier concept visent à préserver ou obtenir une pluralité d’espèces (avec des préférences pour certaines espèces), alors que des actions en faveur du deuxième concept visent à limiter la souffrance des animaux qui existent, quelle que soit leur espèce.

  • Certaines mesures ont déjà été mises en place comme l’arrêt du gazage des pigeons, engagement pour lequel PAZ a déjà félicité le Maire de Lyon.

  • Sur la quasi-totalité des mesures, la Mairie ne s’engage pas sur une date d’exécution. PAZ est très critique des engagements pris sans date butoir : cela signifie qu’il est très difficile de demander des comptes sur des promesses non tenues puisqu’on peut toujours nous répondre que cela est prévu pour plus tard. Soulignons qu’il ne reste plus que deux ans avant les prochaines élections municipales.

  • En dehors de l’absence de calendrier, beaucoup d’engagements sont très flous. Par exemple, une des mesures consiste à l’ « amélioration des conditions d’accueil » des animaux emprisonnés au zoo : la Mairie cite l’agrandissement des enclos, mais ne dit pas quels animaux seront concernés, ni de quelle surface les enclos seront agrandis, alors qu’il est évident que tous les animaux ne verront pas leur enclos agrandi.

  • Aucun budget n’est évoqué pour chaque mesure. Or, cela est primordial pour assurer leur mise en œuvre.

  • Cette délibération contient un certain nombre de mesures qui sont de l’ordre de l’étude/évaluation. Cela signifie qu’à mi-mandat, la Mairie de Lyon en est encore au stade de la réflexion sur certains points, et cela pose la question de savoir quelles suites seront données à ces études/évaluations (qui seront sans doute rendues, au mieux, juste avant la fin du mandat).

Débat et vote de la délibération portant sur la condition animale lors du Conseil municipal de Lyon de mars 2024

Les mesures concernant les animaux emprisonnés au zoo de Lyon

PAZ est très déçue du positionnement de la Mairie de Lyon concernant son zoo municipal. Alors que Strasbourg et Nancy ont tourné la page de la captivité des animaux sauvages, que Grégory Doucet avait tenu des propos anti-captivité lors des municipales (« les animaux sauvages n’ont pas leur place dans des enclos »), les mesures proposées ne vont pas du tout dans ce sens. Agrandir les enclos ou planter quelques végétaux ne sont que des artifices qui ne règlent pas le problème : il est impossible de répondre aux besoins des animaux sauvages en captivité. Tout comme mentionné en introduction, les mesures, en plus de ne pas être à la hauteur des enjeux, sont floues et sans calendrier, ce qui engage peu la Mairie de Lyon : 

  • Quels animaux verront leur enclos agrandi ? De quelle surface ? Quels enclos seront « améliorés » avec des zones hors de la vue du public ou plus de végétalisation ? Quand tout cela sera-t-il fait (la Mairie de Lyon nous avait déjà annoncé vouloir agrandir l’enclos des panthères de l’Amour il y a un an et demi et ce n’est toujours pas fait) ?

  • Combien de temps faudra-t-il à la Mairie pour évaluer si des animaux doivent être transférés vers un « lieu plus adapté » ? Sur quels critères ? Qu’entend-elle par « lieu plus adapté » (un autre zoo, un refuge, un autre enclos dans le zoo de Lyon…) ? Nous soulignons que, même si la Mairie place certains animaux dans des refuges, cela ne signifie pas que le nombre d’animaux sauvages au zoo de Lyon diminuera car elle ne s’engage en aucun cas, à ne pas faire reproduire les animaux restants et à ne pas en acquérir de nouveaux.

PAZ demande à la Mairie de Lyon plus d’ambition sur la question du zoo. Il est urgent de mettre fin à la reproduction des animaux et aux nouvelles acquisitions. Nous voulons également qu’un travail sérieux soit engagé pour placer les animaux dans des refuges. Le jour du Conseil municipal, nous étions devant l’Hôtel de Ville pour faire entendre nos revendications. Les médias ont largement relayé notre action. Pour en savoir plus, découvrez notre article Actu.

Remarques sur les propos tenus par les autres groupes politiques : 

Il serait injuste de critiquer le projet de la Mairie de Lyon sans critiquer aussi les oppositions qui défendent également le maintien du zoo. Pour la Conseillère Françoise Blanc du groupe « Droite, Centre et Indépendants », le zoo constitue un « réservoir essentiel pour la conservation ». PAZ a déjà répondu à plusieurs reprises à cette rhétorique : non, les zoos ne sont pas une solution pour protéger les espèces menacées (voir cette page pour plus d’explications). Soulignons que contrairement à ce que dit Françoise Blanc, il y a 400 animaux au zoo de Lyon, et non pas 400 espèces. Elle met également en avant un prétendu intérêt pédagogique pour les enfants, tout comme la Conseillère Sandrine Runel du groupe « Socialistes, la gauche sociale et écologique ». Cette dernière va même jusqu’à insister sur le rôle de justice sociale que remplirait le zoo en offrant aux familles défavorisées la possibilité de voir des animaux. C’est comme si nous étions en train de rejouer éternellement les mêmes débats : cet argument nous a été rabâché sur les cirques avec animaux sauvages avant qu’une loi ne soit adoptée ! Il est désespérant et révoltant que des élu-es s’appuient sur les personnes défavorisées pour justifier des politiques en défaveur des animaux : en économisant l’argent gaspillé pour l’entretien du zoo, la Ville de Lyon pourrait lancer des programmes, à destination de ces personnes, comme par exemple des activités de découverte des animaux qui vivent en liberté au parc de la Tête d’Or. Cela aurait l’avantage de développer l’empathie des enfants pour les animaux, plutôt que de leur apprendre à les considérer comme des êtres à notre disposition, que nous pouvons emprisonner pour notre plaisir. Il y aurait d’autres remarques à faire sur le discours de Sandrine Runel mais, pour limiter la taille de cet article, nous terminerons avec un point de sémantique. Il est mensonger de dire que les animaux vivent en « semi-liberté » au zoo de Lyon. Les panthères de l’Amour, la plupart des singes, les chats des sables… sont dans des enclos minuscules sans accès à l’extérieur.

Les mesures concernant les animaux liminaires

Mesures générales

Ces deux mesures nous paraissent très intéressantes mais, encore une fois, il manque beaucoup d’informations pour s’en réjouir totalement : 

  • Où la campagne d’information sera diffusée ? 

  • Quelles espèces seront mentionnées ? 

  • Quelles espèces seront concernées par l’étude ?

  • etc.

De plus, tout comme nous aurions pu faire cette remarque concernant les mesures sur le zoo, à plus de la moitié du mandat, il est décevant d’en être encore au stade des études.

Pigeons

La Mairie de Lyon fait office d’exemple sur la question des pigeons : dès que Grégory Doucet a été élu, les campagnes de capture et de mise à mort ont été arrêtées. Nous félicitons une nouvelle fois la majorité municipale sur ce point. 

Nous faisons cependant une remarque sur le vocabulaire employé qui est problématique :

  • L’usage du terme « euthanasie » ne convient pas. L’euthanasie signifie abréger les souffrance d’un individu qui a une maladie incurable. Aujourd’hui les administrations tuent les pigeons, juste parce qu’ils nous dérangent (ce n’est pas dans leur intérêt). De plus, les méthodes de mise à mort utilisées sont extrêmement violentes (gazage, tête coupée à la pince, torsion du cou…).

  • Le mot « stérilisation » est inadapté : la Mairie de Lyon parle-t-elle de stérilisation chirurgicale, ou de méthodes contraceptives (pigeonniers et maïs contraceptifs) ? Ce n’est pas une question anodine : la stérilisation chirurgicale est une méthode cruelle.

Rats

Malgré les remarques habituelles (absence de calendrier, manque de détails…), PAZ trouve ces mesures sensées. Les méthodes létales prouvent chaque jour leur inefficacité et les rats sont des êtres sensibles : les Villes doivent s’interroger sur leurs méthodes et revoir leur gestion des déchets, qui est le principal levier sur lequel elles peuvent agir.

Corvidés

PAZ est opposée à l’effarouchement qui cause du stress aux animaux et qui n’est pas du tout efficace. De plus, cela pose la question de savoir si la Mairie de Lyon utilisera de l’effarouchement sonore ou si elle compte recourir à des fauconniers : les corvidés risqueraient donc d’être tués. De plus, dresser et placer en captivité des animaux sauvages (les faucons) pose un problème éthique.

Ragondins

En début d’année 2022, la Mairie de Lyon avait fait abattre 17 ragondins. Au vu de la rédaction de la mesure 31, Grégory Doucet ne s’engage pas fermement à ne pas réitérer l’expérience. Nous le déplorons vivement et demandons à la Mairie de Lyon de tout mettre en œuvre pour essayer la stérilisation chirurgicale (à notre connaissance, cela n’a jamais été fait en France), avant que le nombre de ragondins ne deviennent trop grand à ses yeux.

Chats errants

Les mesures proposées vont dans la bonne direction mais restent largement insuffisantes :

  • Il est injuste que ce travail revienne à des associations ou des bénévoles avec quelques subventions. La Mairie devrait considérer cela comme une prestation de service, comme cela se fait pour l’installation et l’entretien de pigeonniers contraceptifs, et prendre donc en charge à 100 % les frais de stérilisation et d’identification des chats errants (trappage, opérations, convalescence et soins).

  • Au vu du service rendu, qui est d’intérêt général, il serait légitime que la Mairie de Lyon mette un local à disposition des associations pour la convalescence des chats errants, comme cela se fait à Saint-Étienne.

Remarques sur les propos tenus par les autres oppositions : 

Loin de briller, les discours des oppositions ont été catastrophiques sur le sujet des animaux liminaires.

La Conseillère Samira Bacha-Himeur a annoncé que son groupe « Pour Lyon » s’abstiendrait sur les mesures concernant les animaux liminaires, car ils ne sont « pas très fans des rats et des punaises de lit ». On pourrait s’attendre à un argumentaire plus développé de la part d’une élue (par ailleurs, la délibération ne mentionne aucunement les punaises de lit et aucune association de protection animale ne demande de mesures concernant ces insectes). Sa collègue Françoise Blanc du groupe « Droite, Centre et Indépendants » s’est, elle, donné la peine de développer une grande tirade anti-pigeons et anti-rats, accumulant bêtise sur bêtise. Il serait trop long de répondre à chacune d’elles donc nous allons rappeler quelques informations de base :

  • Il est démontré scientifiquement que tuer les pigeons est inefficace

  • Malgré la répartition mondiale des pigeons et les contacts étroits et fréquents qu’ils ont avec les humains, les infections causées par les pigeons liminaires sont très rares (voir cet article pour plus détails).

  • Aucun chiffre n’existe sur la population de rats à Lyon ! De même, aucune étude sérieuse n’a établi la proportion de rats qui vivent en surface par rapport à ceux qui vivent dans les égouts (en parlant de chiffres cités par Madame Blanc, notons que 11 pour 1000 équivaut à environ 1 pour 100 et non 1 pour 1000 !) .

  • Il existe un vaccin contre la forme la plus grave de leptospirose, vaccin qui est proposé aux professions les plus à risque comme les égoutiers. Le traitement antibiotique est, quant à lui, efficace sur toutes les souches de leptospirose (le défi est surtout le diagnostic).

  • Romain Lasseur est avant tout une personne qui fait du business sur la dératisation.

  • Les méthodes létales sont utilisées massivement. Pourtant beaucoup de personnes restent insatisfaites de la situation, ce qui montre qu’il y a un réel problème d’efficacité.

Les mesures concernant les animaux d’élevage

La Mairie de Lyon ne s’engage pas sur l’intégralité des mesures de l’association L214 :

  • Aucune mesure ne prévoit l’exclusion des produits de la pisciculture dans les commandes publiques (aucune réglementation ne vise à limiter la souffrance des poissons d’élevage, même en agriculture biologique).

  • Elle ne s’engage pas à exclure l’abattage sans étourdissement (grâce au travail de l’OABA, les élevages bio ne devraient plus avoir le droit d’abattre les animaux terrestres sans étourdissement, mais la Mairie de Lyon prévoit seulement de « privilégier » les produits issus de l’agriculture biologique).

En parallèle, la délibération contient 3 autres mesures qui concernent les animaux d’élevage mais aussi les animaux de compagnie et potentiellement les animaux emprisonnés dans les zoos :

Mesure 58 : Il faut prendre garde à la définition d’un refuge (pas de reproduction, pas d’acquisition payante, une attention particulière doit être portée à l’origine des animaux, question de leur fin de vie…) pour ne pas que cela devienne une ferme pédagogique. Si vous souhaitez en savoir plus sur notre position, vous pouvez lire la contribution que nous avions adressée à la Ville d’Annecy qui envisageait la création d’une ferme pédagogique.

 

Mesure 59 : Encourager les gens à prendre des poules est loin d’être une mesure en faveur de la condition animale puisque cela a tendance à encourager leur marchandisation. De plus, les poules ont besoin d’un accès à l’extérieur et d’un espace suffisamment grand, ce qui n’est pas forcément possible en ville. Enfin, si les personnes achètent ou adoptent des poules dans un but utilitariste (par exemple, avoir des œufs), cela pose la question de la fin de vie des animaux (seront-elles prêtes à payer des frais vétérinaires ? Est-ce que les poules serviront de repas ?…).

 

Mesure 60 : À notre sens, c’est une bonne mesure à condition que cela aille dans le sens de dénoncer l’élevage ou la captivité animale (ce qui impliquerait de mettre en avant les souffrances des animaux emprisonnés au zoo de Lyon).

Les mesures concernant les animaux de compagnie

La Mairie prévoit de multiples mesures qui vont dans la bonne direction (comme par exemple la création d’espaces canins). Si vous souhaitez en savoir plus, consultez directement la délibération.

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